9 - Exonération aide à domicile : éligibilité sous conditions
Pour favoriser le maintien à domicile des personnes fragilisées en raison de leur âge, de leur dépendance ou encore de leur handicap, le législateur a choisi de mettre en place un dispositif d’exonération de cotisations patronales de sécurité sociale pour les structures intervenant au domicile de ces personnes fragiles. À condition de respecter des conditions très strictes.
L'essentiel
Pour accéder au dispositif d’exonération de cotisations patronales « aide à domicile », la structure prestataire doit être agréée et déclarée. / 9-1 à 9-13.
L’exonération est réservée aux heures accomplies au domicile de personnes considérées comme « fragiles ». / 9-1
La structure conclut avec la personne fragile un contrat de mise à disposition de travailleurs. Seule la structure est l’employeur de l’intervenant. / 9-14 et 9-15
Seule l’intervention au domicile privatif (habituel, effectif, principal ou secondaire) du bénéficiaire et situé en France ouvre droit à exonération. / 9-16
Structures agréées et déclarées
Les structures visées
L’exonération de cotisations patronales est applicable aux structures dites « prestataires ». Il s’agit des entreprises, personnes morales de droit privé à but lucratif (c. civ. art. 1832), et des associations, personnes morales de droit privé dont la finalité n’est pas d’être lucrative (loi du 1er juillet 1901, art. 1), disposant d’un agrément et étant déclarées pour l’exercice des activités concernant l’aide à domicile (garde d’enfant ou assistance aux personnes âgées ou handicapées), quel que soit leur statut (c. séc. soc. art. L. 241-10, III ; BOSS, Exonération aide à domicile, § 40, 01/07/2022).
Ces activités n’ouvrent toutefois droit au dispositif qu’à la condition qu’elles soient réalisées au domicile à usage privatif d’une personne dite « fragile » (BOSS, Exonération aide à domicile, § 10, 01/07/2022).
Il convient alors de distinguer les heures effectuées auprès de publics « non fragiles » (ex. : enfant non atteint d’un handicap) de celles effectuées auprès de publics « fragiles », seules éligibles à l’exonération « aide à domicile ».
Sont considérées comme telles (c. séc. soc. art. L. 241-10, III ; BOSS, Exonération aide à domicile, § 160, 01/07/2022) :
-les personnes de 70 ans et plus ;
-les personnes ayant à charge un enfant atteint d’un handicap ouvrant droit au complément de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé ou à la prestation de compensation du handicap ;
-les personnes ayant dépassé l’âge légal de départ en retraite dans l’obligation de recourir à l’assistance d’une tierce personne. Il s’agit des personnes dans l’incapacité d’accomplir seule, totalement, habituellement et correctement au moins quatre des actes de la vie courante (repas, toilette, lever, coucher etc.) tels que mentionnés dans la grille nationale AGGIR qui permet de mesurer le degré de perte d’autonomie (c. séc. soc. art. L. 241-10, I et D. 241-5-1) ;
-les personnes remplissant la condition de perte d’autonomie requise pour percevoir l’allocation personnalisée d’autonomie ;
-les titulaires soit de l’allocation compensatrice pour tierce personne (CASF art. L. 245-3, 1°), soit d’une majoration pour tierce personne servie au titre de l’assurance invalidité, de la législation des accidents du travail, d’un régime spécial de sécurité sociale ou de l’article L. 18 du code des pensions militaires d’invalidité et des victimes de la guerre, soit de la prestation complémentaire pour recours à une tierce personne servie au titre de la législation des accidents du travail.
L’agrément
L’agrément, condition d’exercice d’une activité d’aide à domicile
La possibilité d’exercer dans le secteur d’activité de l’aide à domicile est soumise à l’obtention préalable d’un agrément, délivré par le préfet du département du lieu d'implantation du principal établissement de la personne morale (c. trav. art. R. 7232-1).
Ce lieu d’implantation correspond généralement au siège social, sauf si la structure a souhaité être domiciliée ailleurs.
Ainsi, l’obtention d’un agrément est obligatoire notamment pour :
-les structures apportant une assistance dans les actes quotidiens de la vie ou une aide à l'insertion sociale aux personnes âgées ou handicapées ou atteintes de pathologies chroniques qui ont besoin d'une aide personnelle à leur domicile, à l'exclusion, sauf exception, des actes médicaux ;
-les structures exerçant une activité de prestation de conduite du véhicule personnel des personnes âgées, handicapées ou atteintes de pathologies chroniques, du domicile au travail, sur le lieu de vacances ou pour des démarches administratives ;
-les structures exerçant une activité d’accompagnement des personnes âgées, handicapées ou atteintes de pathologies chroniques dans leurs déplacements hors du domicile (c. trav. art. D. 7231-1).
Condition d’obtention de l’agrément
La demande d’agrément est adressée par la structure au préfet de département par voie électronique ou par lettre recommandée avec avis de réception (c. trav. art. R. 7232-1).
L’agrément est délivré suivant des critères de qualité. Ainsi, la structure doit disposer des moyens (humains, matériels, financiers) nécessaires pour assurer l’activité pour laquelle l’agrément est demandé (c. trav. art. R. 7232-6, 1°). Ces moyens sont évalués grâce à la demande d’agrément qui doit mentionner la nature des prestations proposées et des publics ou clients visés, les conditions d'emploi du personnel ainsi que les moyens d'exploitation mis en œuvre (c. trav. art. R. 7232-2).
La structure doit aussi respecter un cahier des charges précisant les conditions de fonctionnement, d'organisation et, le cas échéant, de continuité des services, ainsi que les conditions de délivrance et d'évaluation des prestations (c. trav. art. R. 7232-6, 2°). Le contenu de ce cahier des charges est présenté par le décret 2016-502 du 22 avril 2016.
En outre, son dirigeant ne doit pas avoir fait l’objet d’une condamnation pénale ou d'une sanction civile de nature à lui interdire « de gérer, administrer ou diriger » une entreprise ou une association ou d’exercer une activité commerciale (c. trav. art. R. 7232-6, 3°).
Par ailleurs, lorsque l’activité d’aide à domicile est en lien avec des mineurs, le dirigeant de l’entreprise ou de l'association ainsi que les personnes qu’ils mettent à disposition pour intervenir auprès des enfants ne doivent pas être inscrits sur le fichier judiciaire national automatisé des infractions sexuelles ou violentes (c. trav. art. R. 7232-6, 4°).
Le silence gardé par le préfet pendant plus de 3 mois à compter de la date de réception d'un dossier complet de demande d'agrément emporte décision d'acceptation (c. trav. art. R. 7232-4, al. 3).
Durée et renouvellement de l’agrément
L'agrément est délivré pour une durée maximale de 5 ans (c. trav. art. R. 7232-7).
La demande de renouvellement doit être déposée au plus tard 3 mois avant le terme de l'agrément que l’on souhaite renouveler (c. trav. art. R. 7232-8, al. 1).
Obligations liée à l’agrément
L’agrément ainsi que son maintien sont soumis au respect de la réglementation en matière d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail.
La structure a également l’obligation de transmettre au préfet compétent périodiquement un état d’activité et un bilan qualitatif et quantitatif de l'activité exercée (c. trav. art. R. 7232-9).
Établissements multiples
Si la structure compte plusieurs établissements, le préfet du lieu d'implantation de son siège social recueille l'avis des présidents de conseil départemental du lieu d'implantation des établissements, par l'intermédiaire des préfets territorialement compétents.
Toute création d'établissement fait l'objet d'une demande de modification de l'agrément adressée au préfet du lieu d'implantation ou de l'entreprise. Ce dernier recueille l'avis du président du conseil départemental du lieu d'implantation du nouvel établissement par l'intermédiaire du préfet territorialement compétent.
Lorsque le préfet consulte un ou plusieurs présidents de conseil départemental, le délai de réponse est porté à 3 mois à compter de la date de réception de la demande d'agrément, dès lors que le dossier est complet. Le silence gardé par le préfet pendant plus de 3 mois vaut décision d'acceptation (c. trav. art. R. 7232-5).
Retrait de l’agrément
Cet agrément peut être retiré à tout moment dès lors que l’entreprise ou l’association (c. trav. art. R. 7232-12) :
-exerce des activités autres que celles déclarées dans la demande d’agrément ;
-cesse de remplir les conditions ou de respecter les obligations légales ;
-n’adresse pas au préfet l'état d’activité et le bilan qualitatif et quantitatif requis.
La déclaration
Condition d’exercice à titre exclusif
Les employeurs agréés souhaitant bénéficier des mesures d’exonérations sont tenus de déclarer leur activité (c. trav. art. L. 7232-1-1).
L’exonération est également subordonnée à l’exercice de l’activité à titre exclusif (c. trav. art. L. 7232-1-1).
Cette condition est présumée remplie lorsque l’employeur a effectué la déclaration mais un contrôle qui prouverait le contraire expose la structure prestataire au retrait de la déclaration et à la perte du bénéfice de l’exonération jusqu’à ce qu’une nouvelle déclaration soit faite l’année suivante (c. trav. art. L. 7232-8 ; BOSS, Exonération aide à domicile, § 50, 01/07/2022).
À noter
Certaines structures sont dispensées de la condition d’activité exclusive. Il s’agit notamment :
-des associations intermédiaires ;
-des unions et fédérations d’associations ;
-des prestataires appelés à fournir les services spécifiques individualisables dans les copropriétés avec services, mentionnés à l'article 41-4 de la loi 65-557 du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ;
-des gérants de résidences-services relevant de l'article L. 631-13 du code de la construction et de l'habitation.
Procédure de la déclaration
La déclaration doit être effectuée auprès du préfet du département du lieu d’implantation du principal établissement de l’entreprise, qui est le plus souvent le siège social. Lorsque la structure prestataire est établie hors France, elle effectue sa déclaration auprès du préfet du département où sa principale activité sera exercée (c. trav. art. R. 7232-16).
Elle est envoyée par voie électronique ou par lettre recommandée avec avis de réception par le représentant légal de l’entreprise ou de l’association (c. trav. art. R. 7232-16).
Mentions de la déclaration
La déclaration doit mentionner les éléments suivants (c. trav. art. R. 7232-17) :
-la raison sociale et l’adresse de l’entreprise ou de l’association ;
-les services à la personne proposés ;
-l’engagement, par la structure, d’exercer à titre exclusif son activité d’aide à domicile ;
-en cas de dispense légale d’exercer l’activité d’aide à domicile à titre exclusif, l’engagement du dirigeant de la structure de tenir une comptabilité pour les prestations de services à la personne et pour ses autres prestations ;
-le cas échéant, pour certaines prestations identifiées, l'engagement de les inclure dans une offre de services comprenant un ensemble d'activités de services à la personne réalisées à domicile.
Déclaration complète ou incomplète
À sa réception, le préfet du département du lieu d’implantation de la structure réalise les opérations suivantes (c. trav. art. R. 7232-18) :
-en cas de déclaration complète, il enregistre la déclaration et délivre un récépissé à la structure. Ce récépissé sera ensuite publié au recueil des actes administratifs de la préfecture ;
-en cas de déclaration incomplète, il invite la structure à fournir les éléments manquants.
Effets
La déclaration est théoriquement valable sans limitation de durée (sur le retrait de l'enregistrement de la déclaration, voir ci-après). Elle permet à l’employeur de bénéficier des mesures d’exonérations à compter du premier jour du mois qui suit la publication du récépissé (c. trav. art. R. 7232-18).
Retrait de l'enregistrement de la déclaration
L'enregistrement de la déclaration peut être retiré par le préfet du département lorsque l'employeur ne remplit plus les conditions ou ne respecte plus ses obligations (notamment la condition d'activité exclusive, l'obligation de tenir une comptabilité séparée, ou l'engagement, pour certaines prestations identifiées, de les inclure dans une offre de services comprenant un ensemble d'activités de services) (c. trav. art. R. 7232-20).
Il en va de même si l’employeur, après mise en demeure restée sans effet, ne respecte pas de façon répétée son obligation de transmettre au préfet un état trimestriel de son activité, un bilan quantitatif et qualitatif de son activité au titre de l’année écoulée ainsi qu’un tableau statistique annuel (c. trav. art. R. 7232-19 et R. 7232-20).
Préalablement à toute décision de retrait, une mise en demeure est envoyée par le préfet à la structure prestataire qui dispose de 15 jours pour faire valoir ses observations et ainsi régulariser la situation (c. trav. art. R. 7232-20).
Si le préfet du département estime ensuite que les manquements révélés justifient seulement une modification des termes de la déclaration, la structure prestataire est invitée à procéder aux modifications requises (c. trav. art. R. 7232-20).
Le préfet informe de sa décision le directeur des services fiscaux et l’organisme chargé du recouvrement des cotisations de sécurité sociale territorialement compétents (c. trav. art. R. 7232-20).
La décision de retrait de l'enregistrement de la déclaration est d’effet immédiat (c. trav. art. R. 7232-21) et fait perdre à la structure le bénéfice des mesures d’exonération (c. trav. art. R. 7232-20).
La structure prestataire est tenue d’informer de la décision préfectorale de retrait les bénéficiaires de ses prestations par lettre individuelle (c. trav. art. R. 7232-21).
Elle doit attendre un délai de 12 mois avant d'effectuer une nouvelle déclaration (c. trav. art. R. 7232-22).
Les conditions d’emploi du salarié
Un salarié sous contrat à durée indéterminée ou déterminée
L’exonération est applicable aux salariés des structures d’aide à domicile employés sous CDI ou CDD afin de remplacer les salariés déjà absents ou dont le contrat de travail est suspendu (c. séc. soc. art. L. 241-10, III).
Contrat de mise à disposition de travailleurs
Dans le cadre de l’aide à domicile, le bénéficiaire de l’aide et la structure concluent un contrat de mise à disposition de travailleurs. Seule la structure est l’employeur de l’intervenant. Le bénéficiaire de la prestation de service, client de la structure, n’est ainsi pas lié à l’intervenant à domicile par un contrat de travail (c. trav. art. L. 7232-6).
L’exercice d’une activité d’aide à domicile
Seuls les salariés qui exercent une activité d’aide à domicile mentionnée à l’article D. 7231-1 du code du travail sont éligibles au dispositif d’exonération.
Il s’agit ainsi des activités concernant la garde d’enfants ou l’assistance aux personnes âgées ou handicapées dans les actes essentiels de la vie quotidienne à leur domicile (c. séc. soc. art. L. 241-10, III ; BOSS, Exonération aide à domicile, § 140, 01/07/2022).
À noter
Sont expressément exclues du dispositif d’exonération des aides à domicile les activités à domicile relevant des soins médicaux, les activités éducatives et les activités de travail social. À titre d’exemple, cette exonération n’a pas lieu d’être en présence d’actes de soins prodigués par une aide-soignante au domicile de la personne dite fragile puisque ces actes relèvent d’une prescription médicale (cass. civ., 2e ch., 26 mai 2016, n° 15-16193 D).
L’activité s’exerce :
-auprès des différentes catégories de personnes qualifiées de « fragiles » (BOSS, Exonération aide à domicile, § 160, 01/07/2022) ;
-pour des interventions effectuées au domicile à usage privatif des bénéficiaires.
Le domicile doit être situé en France et ce domicile doit être le lieu de résidence habituelle et effective, principale ou secondaire, du bénéficiaire, sans distinction de propriété ou de location (c. séc. soc. art. L. 241-10, I et circ. DGE 2019-05 du 11 mai 2019 relative aux activités de services à la personne).
Le lieu de dispensation des services ouvrant droit à l’exonération ne peut pas être une résidence temporaire (circ. DGE 2019-05 du 11 mai 2019 précitée).
De plus, l’exonération n’est pas ouverte aux interventions dispensées dans les parties collectives des copropriétés qui ne sont pas assimilables au domicile des résidents, ni dans les structures collectives dont la nature des prestations implique que la personne n’est plus autonome (cass. civ., 2e ch., 14 mars 2013, n° 11-28333 D ; cass. civ., 2e ch., 10 octobre 2013, n° 12-24469 D).