6 - PLFSS 2023 : les amendements retenus en paye après « adoption » par les députés
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 est considéré comme adopté par l'Assemblée nationale après recours du gouvernement à l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, d'abord sur la troisième partie du texte, puis sur sa totalité. Synthèse des principaux amendements « paye » retenus, alors que le Sénat a entamé à son tour l'examen du projet de loi.
Projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023, considéré comme adopté par l'Assemblée nationale le 31 octobre 2022
L'essentiel
Les cotisations AGIRC-ARRCO seraient recouvrées par les URSSAF au 1er janvier 2024. / 6-1
Des précisions sont apportées quant aux modalités d'imputation de la déduction forfaitaire de cotisations patronales pour les entreprises de 20 à moins de 250 salariés. / 6-2
La suppression de l'exonération « TO-DE » du secteur agricole serait repoussée au 1er janvier 2026. / 6-3
Le projet de loi entend compléter le cadre juridique en matière de fiabilisation et de correction des données issues de la DSN. / 6-4
En matière de contrôle URSSAF, l'extension du champ des documents et informations susceptibles d'être vérifiés serait assortie de garanties en matière d'information des personnes contrôlées. / 6-5
L'employeur serait toujours tenu d'avancer la somme correspondant aux IJSS maternité, adoption ou paternité, mais il n'y aurait pas nécessairement subrogation. / 6-6
Les plateformes de téléconsultation auraient l'obligation d'informer les professionnels de santé et les assurés des conditions d'indemnisation des arrêts maladie prescrits à distance. / 6-7
Cotisations sociales : recouvrement, déductions et exonérations
Recouvrement des cotisations AGIRC-ARRCO par les URSSAF : report au 1er janvier 2024
Un amendement au PLFSS 2023 prévoit de reporter au 1er janvier 2024, pour toutes les entreprises, le transfert du recouvrement des cotisations AGIRC-ARRCO aux URSSAF (PLFSS art. 6 bis, III, A). Ce transfert ne devrait donc finalement pas se faire en deux temps (1er janvier 2023 pour certaines entreprises, puis généralisation au 1er janvier 2024), comme cela avait été un temps envisagé.
Cet amendement précise que le recouvrement de la cotisation APEC, actuellement assuré par l’AGIRC-ARRCO, sera également transféré aux URSSAF au 1er janvier 2024 (PLFSS art. 6 bis, I, 1°).
À noter
Par ailleurs, le transfert aux URSSAF du recouvrement des cotisations d’assurance retraite collectées par les caisses dont la gestion est assurée par la Caisse des dépôts et consignations (CNRACL, IRCANTEC…), initialement programmé au 1er janvier 2023, est quant à lui reporté à 2025 « compte tenu de la nécessité d’organiser un cadencement de la mise en œuvre de ces différents projets », selon les termes de l’amendement à l’origine de cette mesure (PLFSS art. 6 bis, III, B).
Déduction forfaitaire de cotisations patronales pour les entreprises de 20 à moins de 250 salariés : nouvelles modalités d’imputation
Pour rappel, la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat a mis en place, dans les entreprises de 20 à moins de 250 salariés, une déduction forfaitaire des cotisations patronales pour toute heure supplémentaire effectuée par les salariés à compter du 1er octobre 2022 et, pour les salariés sous convention de forfait en jours sur l’année, au titre des jours travaillés au-delà de 218 jours par an dans les conditions prévues par le code du travail (loi 2022-1158 du 16 août 2022, art. 2, I et II ; voir FH 3952, § 8-2).
À noter
Même si le décret d’application attendu n’est pas encore sorti, le Bulletin officiel de la sécurité sociale (BOSS) a d’ores et déjà annoncé que le montant de cette déduction s’élèvera à 50 centimes par heure supplémentaire effectuée à compter du 1er octobre 2022. Pour les salariés en convention de forfait en jours, il sera de 3,50 € par jour supplémentaire travaillé au-delà de 218 jours par an dans les conditions prévues par le code du travail.
Alors que la loi pouvoir d’achat prévoyait que la déduction s’imputerait sur les sommes dues par les employeurs aux organismes de recouvrement au titre des majorations salariales (c. trav. art. L. 3121-28 et L. 3121-59) versées au moment du paiement de cette durée de travail supplémentaire, le PLFSS pour 2023 envisage son imputation sur les cotisations dues au titre de l’ensemble de la rémunération du salarié (PLFSS art. 11 bis).
Selon l’amendement à l’origine de cette mesure, cela permet « d’aligner les modalités de mise en œuvre de cette déduction sur celle applicable dans les entreprises de moins de 20 salariés ».
Par ailleurs, le PLFSS 2023 rend applicable la déduction forfaitaire de cotisations patronales aux entreprises de 20 à moins de 250 salariés à Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon.
Exonération « TO-DE » du secteur agricole : suppression repoussée au 1er janvier 2026
Le texte du PLFSS présenté en conseil des ministres prévoyait de reporter d’un an, soit au 1er janvier 2024, la suppression de l’exonération « TO-DE » du secteur agricole (voir FH 3959, § 1-21). Dans sa version adoptée par l’Assemblée nationale le 24 octobre 2022, ce dispositif serait finalement maintenu jusqu’au 31 décembre 2025 (PLFSS art. 7).
Ainsi, cette exonération spécifique de cotisations, dont bénéficient les employeurs embauchant des travailleurs occasionnels (TO) en CDD ou des demandeurs d’emploi (DE) en CDI, ne serait supprimée et remplacée par la réduction générale des cotisations sociales qu’à partir du 1er janvier 2026.
Selon l’amendement à l’origine de cette mesure, l’objectif est de redonner de la visibilité aux agriculteurs en maintenant le dispositif « au moins pour 3 ans, même si l’idéal serait de le pérenniser ». Sa suppression au 1er janvier 2024 viendrait en effet « alourdir le poids des charges sociales des exploitants agricoles » et « dégrader [leur] compétitivité générale ».
Déclarations sociales : fiabilisation et correction des données issues de la DSN
Pour rappel, la version initiale du PLFSS prévoit déjà qu’à compter du 1er janvier 2023, si le cotisant ne corrige pas sa déclaration sociale nominative (DSN) suite au constat d’anomalies, la correction sera effectuée par les organismes de sécurité sociale auxquels la déclaration a été adressée. Elle tiendrait compte des demandes de correction signalées par les autres organismes ou administrations destinataires des données. Ainsi, en cas d’inaction ou de carence prolongée du cotisant, les URSSAF et la caisse de MSA auraient donc « la possibilité d’effectuer elles-mêmes les corrections requises par la production d’une DSN dite de substitution » (voir FH 3959, § 1-13).
Un amendement au PLFSS pour 2023 complète le cadre juridique des vérifications et des contrôles périodiques des DSN.
Ainsi, il est prévu de confier aux URSSAF le soin de vérifier l’exhaustivité, la conformité et la cohérence des informations déclarées par les employeurs lorsque les anomalies ou les erreurs sont susceptibles d’affecter le montant des cotisations recouvrées pour le compte de tous leurs partenaires (PLFSS art. 6 bis, I, 2°).
Le texte ajoute que, dans des conditions prévues par décret, une convention conclue par l’ACOSS (ou l'URSSAF Caisse nationale) avec les organismes pour le compte desquels ces cotisations et contributions sont recouvrées peut prévoir les modalités de contribution de ces organismes à ces opérations de vérification.
« Ce dispositif permettra de mobiliser, en appui à la fiabilisation des données qui les concernent, dans un cadre réglementaire et conventionnel, certains de ces partenaires lorsque la législation qui leur est propre est spécifique, et notamment l’AGIRC-ARRCO », explique l’exposé des motifs de l’amendement.
Contrôle et contentieux : précision sur la procédure de contrôle URSSAF
Pour rappel, le projet de loi initial entend permettre aux agents URSSAF d’utiliser les documents et informations obtenus lors du contrôle de toute personne appartenant au même groupe que l’entreprise qu’ils contrôlent, selon des modalités qui seront fixées par décret. L’agent URSSAF serait tenu d’informer la personne contrôlée de la teneur et de l’origine des documents ou informations ainsi obtenus et sur lesquels il se fonde (voir FH 3959, § 1-4).
Un amendement au projet de loi est venu apporter une précision en indiquant que, dans ce cadre, le décret devra également prévoir le délai d’information de la personne contrôlée (PLFSS art. 6, I, E).
Arrêts de travail maladie et maternité
La subrogation devient une possibilité pour l'avance des IJSS maternité et paternité
Le PLFSS envisage d'imposer à l'employeur de verser au salarié en congé de maternité, d'adoption ou de paternité, dès le premier cycle de paye suivant l'absence, une somme au moins égale aux indemnités journalières de sécurité sociale (IJSS) que percevra l'intéressé (PLFSS art. 37 ; voir FH 3959, § 1-16).
Dans le texte initial, la subrogation était inhérente au dispositif : « L’employeur est subrogé de plein droit à l’assuré dans le versement de ces indemnités journalières ». L'employeur devait ainsi être remboursé par la CPAM de la somme versée au salarié.
Dans la version réputée adoptée par l'Assemblée nationale, la subrogation est devenue une possibilité : « L’employeur peut être subrogé au salarié dans le versement de ces indemnités journalières ». Cette décision appartient à l'employeur, le salarié ne peut pas s'y opposer.
Si l'employeur choisit de ne pas être subrogé, il est logiquement fondé à recouvrer auprès du salarié la somme correspondant aux IJSS qui aura été versée à ce dernier par l'assurance maladie.
D'après l'amendement à l'origine de cette modification, il s'agirait d'entériner une pratique propre à certaines entreprises et administrations publiques.
Obligation pour les plateformes de téléconsultation d'informer les utilisateurs des conditions d'indemnisation des arrêts de travail
Les arrêts maladie prescrits en téléconsultation ne seraient indemnisés que s'ils sont prescrits par le médecin traitant du patient ou par un médecin ayant reçu l'assuré en consultation il y a moins d'un an (PLFSS art. 43 ; voir FH 3959, § 1-19).
Cette mesure a été complétée, pour imposer aux plateformes de téléconsultation d'informer les professionnels de santé et les assurés des règles applicables en matière d’indemnisation des arrêts de travail prescrits lors de téléconsultations.
PLFSS 2023 : où en est-on ?
Le projet de loi de financement de la sécurité sociale est considéré comme adopté par l’Assemblée nationale après le rejet, les 24 et 31 octobre 2022, des deux motions de censure déposées contre le gouvernement en réaction à la mise en œuvre par ce dernier de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution.
Le texte est maintenant devant le Sénat. Son examen a commencé le 7 novembre et devrait prendre fin le 15 novembre. Puis on entrera dans la phase finale d’examen du projet de loi (commission mixte paritaire, nouvelle navette avec dernier mot à l’Assemblée en cas d’échec de la commission mixte paritaire, etc.), pour une publication au Journal officiel à la toute fin du mois de décembre 2022, après probable passage du texte devant le Conseil constitutionnel.