1 - Index de l'égalité : des obligations de publication renforcées
Alors que les entreprises d'au moins 50 salariés viennent de publier leur index de l'égalité professionnelle, on connaît enfin les conditions dans lesquelles elles doivent également publier les mesures de correction qu'elles doivent mettre en œuvre en cas de note inférieure à 75 points et les objectifs de progression qu'elles entendent atteindre en cas de note inférieure à 85 points. Exceptionnellement, en 2022, la date limite de publication de ces nouveaux éléments est fixée au 1er septembre.
Décret 2022-243 du 25 février 2022, JO du 26, texte 23
L'essentiel
L'employeur qui est en dessous de 75 points publie les mesures de correction et de rattrapage au moment du dépôt de l'accord ou de la décision unilatérale définissant ces mesures et, exceptionnellement en 2022, au plus tard le 1er septembre. / 1-3
L'entreprise affiche ses mesures de correction et de rattrapage sur la même page que celle où elle publie l'index et les résultats obtenus à chaque indicateur. / 1-4
En cas de note inférieure à 85 points, l'employeur doit fixer et publier des objectifs de progression pour les indicateurs pour lesquels il n'a pas atteint la note maximale. / 1-5
Il faut publier des objectifs de progression pour les seuls indicateurs pour lesquels l'entreprise n'a pas atteint la note maximale. / 1-6
Comme pour les mesures de rattrapage, l'employeur publie ses objectifs de progression dès lors qu'il a déposé l'accord ou la décision unilatérale fixant ces objectifs et, exceptionnellement en 2022, au plus tard le 1er septembre. / 1-7
La publication des objectifs s'effectue sur la page internet où figure l'index de l'égalité de l'entreprise. / 1-8
L'entreprise transmet les mesures de correction et les objectifs de progression au ministère du Travail et au CSE. / 1-9
Publication de l'index et des résultats des indicateurs chaque 1er mars
Chaque 1er mars au plus tard, les entreprises d'au moins 50 salariés (et celles appartenant à une UES d'au moins 50 salariés) publient sur leur site internet un « index de l'égalité professionnelle », c'est-à-dire une note globale sur 100 points censée refléter les disparités de rémunération entre les femmes et les hommes dans l'entreprise (c. trav. art. L. 1142-8 à L. 1142-10, D. 1142-2 à D. 1142-14 ; voir « Temps de travail, salaire et formation », RF 1126, §§ 3230 et s.).
Cette note repose sur une série d'indicateurs, qui sont au nombre de quatre pour les entreprises de 50 à 250 salariés et de cinq pour les entreprises de plus de 250 salariés. Les résultats obtenus à chaque indicateur doivent également être publiés chaque 1er mars.
L'entreprise qui obtient une note inférieure à 75 points sur 100 doit immédiatement mettre en œuvre des mesures de correction, sous peine de pénalité (c. trav. art. L. 1142-9 et D. 1142-6 ; c. trav. art. L. 2242-8, al. 2, et R. 2242-3 à R. 2242-11). Ces mesures sont prévues par accord collectif ou, à défaut, par décision unilatérale de l'employeur après consultation du CSE.
L'entreprise dispose d'un délai de 3 ans pour revenir à au moins 75 points. À défaut, elle s'expose là encore à une pénalité (c. trav. art. L. 1142-10 et D. 1142-8 à D. 1142-14).
Publication des mesures de correction et de rattrapage en cas d'index inférieur à 75 points
Extension de l'obligation de publication aux mesures de correction par la « loi Rixain »
La loi du 24 décembre 2021 « visant à accélérer l’égalité économique et professionnelle » (dite « loi Rixain ») prévoit que les entreprises qui n'ont pas atteint les 75 points doivent également publier les mesures de correction et, le cas échéant, les mesures financières de rattrapage salarial qu'elles sont tenues de mettre en œuvre (c. trav. art. L. 1142-9 modifié ; loi 2021-1774 du 24 décembre 2021 ; voir FH 3925, § 12-4).
Le décret du 25 février 2022 précise les contours de cette nouvelle obligation de publication, qui est entrée en vigueur cette année (index 2021, à publier le 1er mars 2022 au plus tard).
Au moment du dépôt de l'accord collectif ou de la décision unilatérale (mais en 2022 au plus tard le 1er septembre)
Pour rappel, l'entreprise qui est en deçà de 75 points élabore ses mesures de correction et de rattrapage dans un accord collectif négocié dans le cadre de la négociation périodique sur l'égalité professionnelle ou, à défaut d'accord, dans un texte élaboré unilatéralement par l'employeur, après consultation du comité économique et social (CSE) (voir RF 1126, § 3230).
En toute logique, le décret du 25 février 2022 impose de publier les mesures de correction et de rattrapage « dès lors que l'accord ou la décision unilatérale est déposé » sur la plateforme « TéléAccords » (c. trav. art. D. 1142-6 modifié).
Exceptionnellement, en 2022 (index 2021), les entreprises ont jusqu'au 1er septembre pour publier leurs mesures de correction et de rattrapage (décret 2022-243 du 25 février 2022, art. 4, II).
À partir de 2023, donc en régime de croisière, le dépôt de l'accord ou de la décision unilatérale, ainsi que la publication des mesures de correction, interviendront le plus tôt possible dès la publication de l’index (laquelle doit intervenir le 1er mars au plus tard), dans la mesure où l’entreprise qui ne prend aucune initiative à la suite de la publication d'un index inférieur à 75 points s’expose à une pénalité financière (voir RF 1126, § 3278).
Les employeurs qui « savent » qu’ils seront en deçà de 75 points auront donc intérêt à anticiper les échéances pour négocier ou définir des mesures de correction, car à la lettre, ils ne pourront pas tirer argument d’une publication de l’index au dernier moment (ex. : le 1er mars) pour justifier une publication tardive des mesures de correction.
Publication sur la page internet de l'index et information des salariés
L'entreprise publie ses mesures de correction et de rattrapage sur le site internet de l'entreprise, s'il en existe un, sur la même page que celle où elle publie l'index (note globale) et les résultats obtenus à chaque indicateur (c. trav. art. D. 1142-6 modifié).
Pour rappel, selon les questions/réponses du ministère du Travail, la publication doit être faite « sur la page d’accueil ou dans une rubrique facilement identifiable et accessible en deux ou trois clics ».
Les mesures de correction et de rattrapage publiées doivent demeurer en ligne jusqu'à ce que l'entreprise obtienne un niveau de résultat au moins égal à 75 points.
Par ailleurs, l'employeur porte les mesures de correction et de rattrapage à la connaissance des salariés « par tout moyen » (affichage, intranet…).
Fixation et publication d'objectifs de progression en cas d'index inférieur à 85 points
Nouvelle obligation pour les entreprises « dans le rouge » ou ayant simplement une note inférieure à 85 points
La « loi Rixain » a également posé le principe d'une publication des « objectifs de progression » pour chaque indicateur lorsque les résultats obtenus par l'entreprise se situent « en deçà d'un niveau défini par décret » (c. trav. art. L. 1142-9-1 nouveau ; loi 2021-1774 du 24 décembre 2021 ; voir FH 3925, § 12-4).
On pouvait imaginer que cette obligation concernerait les entreprises qui sont en deçà de 75 points. Mais le ministère du Travail a choisi dans le décret une voie plus exigeante, puisque la publication des objectifs de progression s'impose aux entreprises dont l'index est intérieur à 85 points (c. trav. art. D. 1142-6-1 nouveau).
Par conséquent, cette obligation concerne deux catégories d'entreprises :
-logiquement, celles qui doivent adopter des mesures de correction sous peine de pénalité (score inférieur à 75 points) ;
-mais également celles qui, sans être « dans le rouge », ne sont pas non plus dans les « meilleures élèves » et ont un score allant de 75 à moins de 85 points.
Sans doute le ministère du Travail cherche-t-il ici à faire passer le message qu'il y a toujours une marge de progression : une entreprise qui se situe entre 75 points et moins de 85 points est certes à l'abri de la pénalité associée à l'index de l'égalité, mais elle n'a pas atteint l'égalité. Il lui faut donc définir et publier des objectifs de progression.
À la lettre du décret, et sous réserve des précisions du ministère du Travail, l’obligation de publication porte uniquement sur les objectifs de progression arrêtés, et pas sur les mesures retenues pour les atteindre. C’est une différence avec les mesures de correction à mettre en œuvre en cas de note inférieure à 75 points, qui doivent être publiées.
Chaque indicateur qui n'a pas atteint la note maximale
L'entreprise qui est en deçà de 85 points élabore des objectifs de progression pour les seuls indicateurs pour lesquels elle n'a pas atteint la note maximale (c. trav. art. D. 1142-6-1 nouveau).
Exemples
Une entreprise de plus de 250 salariés a 32 points sur 40 en matière d'écart global de rémunération, 15 points sur 20 à l'indicateur « augmentations individuelles », 12 points sur 15 à l'indicateur « promotions », 15 points sur 15 à l'indicateur « augmentations au retour de congé de maternité » et 5 points sur 10 à l'indicateur relatif à la répartition des sexes dans les plus hautes rémunérations. Son index est de 79 points sur 100. Elle doit publier des objectifs de progression pour tous les indicateurs, à l'exception de celui relatif aux augmentations au retour de congé de maternité.
Une entreprise de 120 salariés a 40 points sur 40 à l'indicateur sur l'écart global de rémunération, 15 points sur 35 à l'indicateur « augmentations individuelles (promotions comprises) », 15 points sur 15 à l'indicateur « augmentations au retour de congé de maternité » et 9 points sur 10 à l'indicateur relatif à la répartition des sexes dans les plus hautes rémunérations. Elle a aussi un index de 79 points sur 100. Elle doit publier des objectifs de progression pour les indicateurs « augmentations individuelles (promotions comprises) » et « répartition des sexes dans les plus hautes rémunérations ».
Lorsqu’il faut fixer un objectif de progression sur l'indicateur relatif à l'écart global de rémunération entre les femmes et les hommes (c. trav. art. D. 1142-2, 1° et D. 1142-2-1, 1°), le décret précise que l’objectif doit permettre d'assurer le respect des dispositions sur l'égalité de rémunération entre les sexes (c. trav. art. L. 3221-2). Ce faisant, le décret insiste sur un principe qui, juridiquement, doit en tout état de cause être respecté indépendamment de la question de l’Index de l’égalité.
Au moment du dépôt de l'accord collectif ou de la décision unilatérale (mais en 2022 au plus tard le 1er septembre)
Comme pour les mesures de rattrapage et de correction, l'employeur publie ses objectifs de progression dès qu'il a déposé l'accord ou la décision unilatérale (voir § 1-3). Ce qui implique qu'il doit chercher à négocier un accord et, en l'absence d'accord, prendre une décision unilatérale pour fixer des objectifs de progression, quand bien même il aurait atteint les 75 points.
Là encore, en 2022 (index 2021), la publication des objectifs de progression peut exceptionnellement attendre jusqu'au 1er septembre (décret 2022-243 du 25 février 2022, art. 4).
Publication sur la page où figurent l'index et les résultats obtenus à chaque indicateur
Comme pour les mesures de rattrapage et de correction, l'employeur publie ses objectifs de progression sur la page où il publie l'index et, le cas échéant, les résultats obtenus à chaque indicateur (voir § 1-4) (c. trav. art. D. 1142-6-1 nouveau).
Ces objectifs doivent demeurer en ligne jusqu'à ce que l'entreprise obtienne un index au moins égal à 85 points.
Par ailleurs, en l'absence de site internet, l'employeur porte les objectifs de progression à la connaissance des salariés « par tout moyen » (affichage, intranet…).
Information du ministère du Travail et du CSE
Dès lors qu'il a déposé l'accord ou le document unilatéral et, exceptionnellement en 2022, au plus tard le 1er septembre (voir § 1-3), l'employeur transmet au ministère du Travail (c. trav. art. D. 1142-6-2 nouveau) :
-les mesures de correction envisagées ou déjà mises en œuvre ;
-les objectifs de progression de chacun des indicateurs pour lesquels il doit en fixer ;
-ainsi que les modalités de publication de ces mesures et de ces objectifs.
Il communique ces informations de la même manière qu'il transmet les éléments de calcul des indicateurs : par télédéclaration, sur le site internet du ministère du Travail (https://index-egapro.travail.gouv.fr/declaration/presentation.html).
L'employeur met également ces informations à la disposition du CSE, par l'intermédiaire de la base de données économiques, sociales et environnementales (BDESE). Là encore, en 2022, cette transmission peut avoir lieu le 1er septembre au plus tard.
Alignement des entreprises ayant bénéficié du plan de relance sur le régime général
L'obligation de publier les mesures de rattrapage et les objectifs de correction s'appliquait au départ aux seules entreprises ayant bénéficié du plan de relance mis en place dans le cadre de la crise sanitaire (loi 2020-1721 du 29 décembre 2020, art. 244). Un décret du 10 mars 2021 en avait défini les modalités d'application (décret 2021-265 du 10 mars 2021). La généralisation de cette obligation a contraint les pouvoirs publics à revenir sur les règles applicables aux entreprises bénéficiaires du plan de relance, pour les aligner sur le régime général.
Ainsi, la publication des objectifs de progression vise donc désormais les entreprises dont l'index est inférieur à 85 points (et non plus à 75 points, comme le prévoyait le décret du 10 mars 2021 dans sa version initiale) (décret 2022-243 du 25 février 2022, art. 3).
De même, pour l'année 2022 (index 2021), ces entreprises avaient jusqu'au 1er mai pour publier leurs mesures de rattrapage et leurs objectifs de progression. Désormais, l'échéance est fixée au 1er septembre 2022.