2 - Engagement de caution non déductible s'il n’en résulte pas une charge réellement dépensée
Le dirigeant d’une société condamné à verser des fonds en qualité de caution solidaire ne peut pas demander la déduction de la somme au titre de ses frais réels si la société lui a avancé les fonds via son compte courant.
CAA Versailles 13 octobre 2022, n° 20VE03412
Les faits
À la suite d’un contrôle fiscal, l’administration a réintégré dans le revenu global d’un contribuable une somme qu'il avait déduite de ses revenus au titre de l'année 2012. Le juge judiciaire l’avait en effet condamné à verser une somme de 240 000 € en sa qualité de caution solidaire de deux prêts contractés par la société dont il était associé majoritaire et gérant.
Le contribuable a contesté le redressement, en revendiquant la nature d’engagement de caution de la somme qu’il prétendait déduire.
Des conditions de déduction encadrées par le juge
Lors de la création de la société et durant l'exercice de l'activité, le dirigeant peut se porter caution au titre des emprunts et au titre des dettes de la société. Tout d'abord, cette déduction ne peut être exercée que dans le cadre d’une option pour les frais réels.
Ensuite, la jurisprudence a dégagé trois conditions cumulatives pour permettre la déduction des sommes versées du revenu imposable du dirigeant, à savoir (voir « Impôt sur le revenu », RF 1133, §§ 421 à 425) :
-l'engagement de caution est directement lié à la qualité de dirigeant ;
-il doit avoir été pris en vue de servir les intérêts de l'entreprise dans le cadre d'une gestion normale ;
- et il ne doit pas être hors de proportion avec les rémunérations allouées ou escomptées.
Enfin, ces conditions doivent être appréciées à la date de l’engagement de caution.
Le paiement doit constituer une charge effectivement exposée
Le juge a donné raison à l’administration. En effet, au cas présent, avant le versement de la somme litigieuse par le contribuable, la société avait inscrit au crédit de son compte courant d'associé une somme d’égal montant, reconnaissant ainsi l'existence d'une dette envers lui. En conséquence, la somme versée en tant que caution ne constituait qu'une avance faite pour le compte de la société et ne pouvait, dès lors, être regardée comme une charge effectivement exposée par le contribuable. Et ce, d'autant plus que ce dernier avait opéré plusieurs prélèvements sur son compte courant.
Par ailleurs, le contribuable avançait que la société n’aurait pas pu procéder au remboursement de cette somme compte tenu de ses difficultés financières. En effet, la société a été déclarée en cessation de paiement en 2015, puis placée en liquidation judiciaire en 2016. Toutefois, il ressort des documents comptables que la situation nette de la société était constamment positive sur la période vérifiée, compte tenu notamment du volume conséquent des créances inscrites à l'actif, et l'éventualité d'un remboursement ne pouvait, ainsi, pas être écartée, a fortiori dès lors que la société avait déjà remboursé plus d'un tiers de la somme au contribuable dès 2012.