Pour la mise en ½uvre des principes dégagés par ces traités, les institutions européennes sont
chargées de l'élaboration de la norme dans l'exercice des compétences qui leur ont été transférées.
L'article 288 du traité FUE distingue entre les règlements, les directives, les décisions et les
recommandations et avis.
I. Les règlements
10 (BOFiP-INT-DG-10-20-§ 10-12/09/2012)
Les règlements sont des actes normatifs revêtant une portée générale. Ils sont directement
applicables dans le droit interne des États membres. La question de leur applicabilité directe est réglée par
l'article 288 du traité FUE. Il s'agit donc de l'acte juridique par lequel les institutions de
l'Union européenne interviennent le plus profondément dans les ordres juridiques nationaux.
Exemple 1:
règlement (CEE) n°2137/85 du 25 juillet 1985 sur les groupements européens d'intérêts économiques (GEIE).
Exemple 2 :
règlement (CE) n°1998/2006 du 15 décembre 2006 concernant l'application des articles 87 et 88 du
traité (articles 107 et 108 du traité FUE) aux aides de minimis.
20 (BOFiP-INT-DG-10-20-§ 20-12/09/2012)
Les règlements sont obligatoires dans tous leurs éléments et constituent des actes juridiques
contraignants pour les institutions, pour les États membres et pour les personnes physiques ou morales auxquels ils s'adressent. Il n'est pas possible d'appliquer de manière incomplète les
dispositions d'un règlement ou de n'en sélectionner qu'une partie.
Le règlement confère des droits et obligations indépendamment de toute mesure nationale
d'exécution. Cela étant, cette caractéristique n'empêche pas les États membres de prendre des mesures d'exécution si cela s'avère nécessaire.
30 (BOFiP-INT-DG-10-20-§ 30-12/09/2012)
Applicable dans tous les États membres dès son entrée en vigueur, le règlement peut être
utilisé par les particuliers dans leur rapport avec d'autres particuliers, les États membres ou les autorités européennes.
Ainsi a pu être invoqué, dans le cadre d'un recours pour excès de pouvoir, le
règlement 816/70 du conseil des communautés
européennes du 28 avril 1970 portant dispositions complémentaires en matière d'organisation commune du marché vini-viticole contre un
décret n°75-846 du 11 septembre 1975 instituant une taxe
sur les vins de tables originaires d'Italie
(CE 1er mars 1985, n° 01176 et 01177).
II. Les directives
40 (BOFiP-INT-DG-10-20-§ 40-12/09/2012)
Les directives sont des instruments juridiques qui fixent un objectif à atteindre dans un
délai déterminé en laissant les États membres maîtres des mesures de mise en ½uvre. C'est le principal outil utilisé dans le cadre de la politique de rapprochement des législations qui cherche à
préserver la diversité des particularités nationales tout en permettant d'éliminer peu à peu les contradictions et les différences entre les législations nationales.
Il en est ainsi de la
directive 90/435/CEE du 23 juillet 1990 concernant le régime fiscal commun applicable aux sociétés mères et
filiales d’États membres différents, abrogée et remplacée par la directive 2011/96/UE du 30
novembre 2011. Cette directive institue un régime assurant l'élimination de la double imposition
des distributions de bénéfices entres sociétés liées établies dans des États membres différents. Elle a été transposé en droit interne par
l'article 25 de la loi n°91-1323
du 30 décembre 1991 de finances rectificative pour 1991.
La
directive 2009/133/CE du 19 octobre 2009, modifiant la directive 90/434/CEE du 23 juillet 1990,
instaure quant à elle un régime fiscal commun applicable aux fusions, scissions, scissions partielles, apports d'actifs et échanges d'actions intéressant des sociétés d’États membres différents, ainsi
qu'au transfert du siège statutaire d'une SE ou d'une SCE d'un Etat membre à un autre.
La
directive 2003/48/CE du Conseil du 3 juin 2003 est intervenue en matière de fiscalité des revenus de
l'épargne sous forme de paiements d'intérêts, et la directive 2003/49/CE, adoptée le même jour, institue un régime fiscal commun applicable aux paiements d'intérêts
et de redevances effectués entre des sociétés associées d'États membres différents.
Par ailleurs, la
directive 77/388/CEE du Conseil en matière d'harmonisation des législations des États membres relatives aux
taxes sur le chiffre d'affaires pour un système commun de taxe sur la valeur ajoutée en vue d'établir une assiette uniforme, dite « sixième directive », a été adoptée le 17 mai 1977. Cette directive a
été refondue dans le cadre de la
directive2006/112/CE
du Conseil du 28
novembre
2006.
Enfin,
la directive
2010/24/UE du 16 mars 2010 concernant l'assistance mutuelle en matière de recouvrement des
créances relatives aux taxes, impôts, droits, et autres mesures a remplacé la directive 76/308/CEE, et la
directive 2011/16/UE du Conseil relative à la coopération administrative dans le domaine fiscal, se substitue à la
directive 77/799/CEE.
Comme le règlement, la directive est un acte obligatoire, de portée générale, qui doit être
appliqué dans tous ses éléments par les États membres. Elle peut viser tout ou partie des États membres.
50 (BOFiP-INT-DG-10-20-§ 50-12/09/2012)
Cela étant, la directive se distingue du règlement en ce qu'elle nécessite un acte de
transposition par les États membres car elle ne contient pas de modalités d'application. Elle n'impose qu'une obligation de résultat aux États membres qui sont ensuite libres de choisir la forme et
les moyens qu'ils jugent pertinents pour appliquer la directive dans le cadre de leur ordre juridique interne.
Par conséquent, la directive est un acte juridique dont l'entrée en vigueur ne produit en
principe pas d'effet direct dans les droits nationaux, autre que l'obligation faite aux États membres d'adopter des mesures nationales destinées à se conformer aux résultats prescrits par la
directive, dans un délai fixé par les institutions qui varie de six mois à deux ans.
Ainsi, la transposition des directives européenne constitue une obligation reconnue comme «
une exigence constitutionnelle » par le Conseil constitutionnel
(décision n°2008-564 DC du 19 juin 2008)
et par le Conseil d’État (CE 30 octobre 2009,
n°298348).
60 (BOFiP-INT-DG-10-20-§ 60-12/09/2012)
La directive destinée aux États membres n'a pas pas d'effet direct dans le sens où elle ne
crée pas de droits ou d'obligations directs pour les citoyens de l'Union car seuls les États membres (ou, le cas échéant, une partie) en sont destinataires. Ce ne sont que les actes de transposition
de la directive en droit interne qui confèrent des droits et obligations aux citoyens de l'Union européenne. C'est ce qui différencie la directive du règlement.
Il ne faut néanmoins pas confondre les notions « d'effet direct » avec celle d' « invocabilité
» d'une directive dans un litige par un particulier.
Ainsi, si les actes nationaux d'application requis pour transposer une directive n'ont pas été
adoptés ou ne l'ont été que de façon incomplète, la Cour de justice a décidé que, dans certaines circonstances, le citoyen de l'Union peut invoquer directement les dispositions d'une directive et se
prévaloir des droits qu'elle lui octroie et, le cas échéant, les faire reconnaître par les tribunaux nationaux. Ainsi, la directive a un effet direct vertical à l'expiration de son délai de
transposition (CJCE 5 avril 1979, Affaire C-148/78, Ratti).
Selon la jurisprudence européenne, un particulier peut invoquer le texte à l'encontre des
États devant les tribunaux si :
- les dispositions de la directive sont inconditionnelles et suffisamment précises ;
- la directive n'a pas été correctement transposée par une mesure nationale dans les délais
prévus.
70 (BOFiP-INT-DG-10-20-§ 70-12/09/2012)
Le Conseil d'Etat est revenu sur sa jurisprudence aux termes de laquelle il considérait
qu'une personne ne pouvait, à l'appui d'un recours contre une décision administrative individuelle, invoquer directement une disposition d'une directive, même si l’État avait été défaillant dans son
obligation de transposition (CE 22 décembre
1978, n°11604, Ass.,Ministre de l'intérieur c/ Cohn-Bendit). Il s'est rallié récemment à la position du juge européen : désormais, tout justiciable peut se prévaloir à l'appui d'un recours dirigé
contre un acte administratif, même non règlementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d'une directive lorsque l'Etat n'a pas pris les mesures de transposition nécessaires dans les
délais impartis (CE 30 octobre 2009,
n°29834 , Assemblée, Perreux, précité).
L'applicabilité directe d'une directive non transposée ne fonctionne qu'à l'égard des
particuliers. L'État ne peut pas se prévaloir à l'égard d'un contribuable d'une directive non transposée (CJCE
26 février 1986, Affaire C-152/84, Marshall).
En revanche, la directive n'a pas d'effet direct horizontal : elle ne peut pas être
invoquée à l'encontre d'autres particuliers devant les tribunaux (CJCE 22 novembre 2005, Affaire C-144/04,
Mangold).
III. Les décisions
80 (BOFiP-INT-DG-10-20-§ 80-12/09/2012)
La décision est également un acte juridique obligatoire qui peut être pris par le Conseil, sur
proposition de la Commission ou sur sa propre initiative ou par la Commission, sur habilitation du Conseil ou en vertu de ses propres pouvoirs.
Elle peut avoir une portée générale, comme par exemple la
décision du Conseil n°2004/587/CE du 19 juillet 2004 en matière de fiscalité des revenus de l'épargne
sous forme de paiements d'intérêts : les destinataires de cette décision sont l'ensemble des États membres.
Elle peut également être adressée à un destinataire précis : la
décision du Conseil n°2007/880/CE du 20 décembre 2007 autorisant la France à appliquer un taux
d'imposition réduit à l'essence sans plomb utilisée comme carburant et mise à la consommation dans les départements de Corse conformément à
l'article 19 de la directive 2003/96/CE : la France est la seule destinataire de cette décision.
90 (BOFiP-INT-DG-10-20-§ 90-12/09/2012)
Les décisions constituent la catégorie d'actes juridiques normatifs de l'UE par laquelle ses
institutions vont assurer une application efficace des traités et règlements en agissant directement sur la situation des citoyens de l'UE, des entreprises ou des États membres. Par ce moyen, les
institutions peuvent exiger d'un État membre ou d'un citoyen de l'Union qu'il agisse ou qu'il s'abstienne d'agir, lui conférer des droits ou lui imposer des obligations.
La décision n'a d'effet contraignant qu'à l'égard de son ou ses destinataires qui peut(vent)
être un ou plusieurs États membres ou des personnes physiques ou morales.
Elle peut être utilisée par la Commission européenne pour sanctionner des entreprises qui
réalisent des ententes ou commettent des abus de position dominante (par exemple, décision de la
Commission du 24 mai 2004 relative à une procédure d'application de l'article 82 du traité CE
(article 102 du traité FUE) et de
l'article 54 de l'accord sur l'espace économique européen (EEE) engagée contre Microsoft-Corporation
(Affaire COMP/C-3/37.792- Microsoft).
Elle est également utilisée par la Commission européenne dans le cadre du contrôle des mesures
fiscales sur le terrain des aides d’État. De ce point de vue, la décision peut avoir des conséquences financières qui peuvent être individuellement très lourdes pour les contribuables. En effet, tout
manquement dans ce domaine se traduit inévitablement par une procédure visant à la récupération de l'aide déclarée illégale.
A cet égard, la
décision n°2004/343/CE de la Commission du 16 décembre 2003 relative au régime d'aide mis à exécution
par la France concernant la reprise d'entreprises en difficulté par le dispositif du 44 septies du CGI en vigueur a induit un important dispositif de reversement de
l'aide illégale.
100 (BOFiP-INT-DG-10-20-§ 100-12/09/2012)
La décision est directement applicable et obligatoire dans tous ses éléments. Elle est
d'application directe dans l'ordre interne et crée des droits et obligations au bénéfice ou à la charge de ses destinataires. Elle peut être invoquée par un tiers devant les juridictions nationales
lorsque la décision a créé des droits à son encontre. Ainsi, la décision prise par la Commission européenne d'interdire une entente illicite peut être invoquée par l'entreprise victime de cette
entente en vue d'obtenir la condamnation des auteurs de cette entente par le juge national.
110 (BOFiP-INT-DG-10-20-§ 110-12/09/2012)
La décision entre en vigueur par sa notification à l'intéressé. Sa publication au Journal
Officiel ne dispense pas de la procédure de notification pour rendre la décision opposable à son destinataire.
IV. Les recommandations et avis
120 (BOFiP-INT-DG-10-20-§ 120-12/09/2012)
Les recommandations et avis sont des actes sans portée juridique contraignante. Ils ne lient
pas leur destinataire qui peuvent être des États membres ou des particuliers.
Tel est le cas de
l'avis de la Commission n°92/513/CEE du 23 octobre 1992 adressé au gouvernement français concernant un
projet de loi relatif à l'exploitation commerciale des voies navigables.
Il en est de même de la
résolution du Conseil n °2010/C 156/01 du 8 juin 2010sur la coordination des règles relatives aux
sociétés étrangères contrôlées (SEC) et à la sous-capitalisation au sein de l'Union européenne, qui vise à recommander l'adoption de principes directeurs en la matière et insiste sur l'importance de
l'assistance mutuelle entre États membres aux fins de détecter et de combattre les man½uvres abusives.
Dépourvus d'effet contraignant, ces actes ne font pas grief et ne peuvent donc, en principe,
faire l'objet de recours contentieux devant les juridictions(article 263 du traité FUE).